jeudi 16 août 2012

Marina, Carlos Ruiz Zafon






Ado, j'étais toujours frustrée de voir que les auteurs ne me semblaient jamais aller au bout de leurs idées concernant l'horreur et le glauque. Les livres effrayants, destinés aux ados, m'ont toujours paru fades, brouillons... Il faut dire que grandir, gamin, avec la série des Chair de Poule, et enchaîner direct avec le Shining de Stephen King, ça forge tout de suite certaines attentes au niveau horreur.

Marina, c'est le genre de roman que j'aurai adoré, ado. C'est également le genre de roman que j'adore, adulte. Une mère de famille m'a avoué l'interdire à sa fille de 14 ans, cependant, le considérant comme trop glauque, trop malsain pour son âge. Je sais que des enfants sont plus sensibles que d'autres, mais ce roman, classé dans les romans jeunesses même si une édition adulte existe, ne m'a jamais paru agressif pour autant. Bref, l'éternel question de la censure...

Oscar est dont un jeune adolescent en pensionnat dans la Barcelone des années 80.. Il aime à explorer la ville et ses quartiers fantômes. C'est au cours de ses pérégrinations qu'il fera la rencontre de Marina, jeune fille de son âge, vivant seule en compagnie de son père malade, German.

Le résumé ne fait pas envie? Et pourtant dieu que ce roman est beau... Histoire d'amour sur plusieurs plans, celle naissante de Marina et Oscar, celle passée de German, qui continue de le hanter, et celle maudite des héros tourmentés que croiseront les enfants à travers les rues de Barcelone, Marina porte l'héritage des romans gothiques et de tous ces grands classiques de la littérature avec leurs amours maudits. Carlos Ruiz Zafon décrit avec un don rare, la ville de Barcelone, lui offrant une atmosphère quasi mystique qui hante et obsède, et insuffle une beauté à chacune de ses phrases, beauté que la traduction française rend sans problèmes.
Entre le fantastique, le gothique et le dramatique, l'auteur n'hésite pas à se montrer glauque et sans pitié, des thèmes graves comme la mort et la maladie sont ainsi abordés avec des mots d'adultes, confrontant les enfants à une perte presque totale de leur innocence. Parlons en des enfants, justement. Des héros attachants, avec des caractères bien définis et qui ne tombent pas dans le piège des personnages trop parfaits. Ils sont mâtures, ils ont également leurs défauts, mais surtout, ils ont des sentiments, des émotions à fleur de peau qui explosent au fil des pages entre les ruelles de cette ville maudite.

Le final, sombre, amer, mélancolique, ne m'a pas laissé de marbre. Il pouvait se deviner, certes, mais l'auteur n'a pas pour intention de jouer sur l'effet de surprise. A l'image de l'un des personnages, nous vivons dans un espèce de semi-déni quant à la suite des évènements, mais être aveugle aux choses ne les a jamais empêché de se produire. Tout arrive, même le pire, et vivre ce pire est également un des nombreux voyages de notre vie, ainsi la gare qui ouvre et conclut le roman prend toute sa valeur symbolique. En vivant cette aventure, les enfants auront à accepter leur propre condition et surtout, à devenir adultes.

En Bref:  Encore une de mes lectures coup de coeur, un roman qui ne perd pas de sa force même après une relecture, des personnages attachants, une intrigue qui multiplie les références tout en se créant sa propre identité, une tristesse sous-jacente dans chacune des pages... Un roman beau, poignant, qui nous redonne un peu de notre innocence pour nous l'enlever sans concession au fil de notre lecture.

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